


PANDEMIE du CORONAVIRUS
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Célébrations du 27 mars 2020
Messe à Lourdes - bénédiction Urbi et Orbi du Pape

Ce soir, le pape François va unir toute l’Eglise
pour une prière extraordinaire
Le pape François a invité tous les fidèles à le rejoindre par le biais des médias pour un moment de prière depuis la basilique Saint-Pierre de Rome, ce vendredi 27 mars à 18h. Une initiative exceptionnelle qui sera l’occasion pour le souverain pontife de donner la bénédiction Urbi et Orbi (« à la Ville et au Monde »). Un événement historique à de nombreux égards.
Face à l’épidémie de covid-19, le pape François va poser un geste spirituel extrêmement fort en donnant une bénédiction Urbi et Orbi, « à la Ville et au Monde » ce vendredi 27 mars. À partir de 18h, le souverain pontife ne va pas apparaître au balcon de la basilique Saint-Pierre comme c’est habituellement le cas pour les bénédictions Urbi et Orbi mais sur le parvis de la place Saint-Pierre, qui sera « entièrement vide » en raison du confinement. Mais ce vide ne sera que physique : la foule à laquelle s’adressera le primat d’Italie ne sera pas massée comme d’ordinaire entre les colonnes du Bernin mais disséminée derrière de multiples écrans dans le monde entier.
Le pape François invite en effet chacun à « y participer par les moyens de communication », dont Aleteia : « Nous écouterons la Parole de Dieu, nous élèverons notre supplication, adorerons le Saint-Sacrement avec lequel, au terme de la cérémonie, je donnerai la bénédiction Urbi et Orbi, à laquelle sera jointe la possibilité de recevoir l’indulgence plénière. »
Le successeur de Pierre sortira hors des murs léonins pour la première fois depuis son pèlerinage à Sainte-Marie-Majeure puis à San Marcello del Corso le 15 mars dernier. Il s’était rendu dans chacune de ces église pour prier successivement devant l’icône Salus Populi Romani (‘sauvegarde du peuple romain’ en latin) puis devant le ‘Christ miraculeux, un crucifix qui aurait sauvé la capitale italienne de la Grande Peste au XVIe siècle. Cette icône et cette croix ont été rapatriées au Vatican afin d’être disposées devant le souverain pontife lors de la veillée de prière, près de la porte centrale de la basilique.
Habituellement prononcée à Noël et à Pâques ainsi que lors de l’élection d’un nouveau pape, la bénédiction Urbi et Orbi de ce vendredi est un signal fort envoyé au monde. Face à la pandémie du coronavirus, nous sommes appelés à répondre par « l’universalité de la prière, de la compassion et de la tendresse », martèle depuis plusieurs semaines le pape François.
« À tous ceux qui s’uniront spirituellement à ce moment de prière transmis par les médias sera concédée l’indulgence plénière selon les conditions prévues dans le récent décret de la pénitencerie apostolique », a précisé le Bureau de presse du Saint-Siège. Daté du 19 mars, le décret prévoit notamment que cette dernière peut être accordée à tous les fidèles qui offrent un temps de prière pour « implorer du Dieu tout-puissant la cessation de l’épidémie, le soulagement de ceux qui en sont affligés et le salut éternel de ceux que le Seigneur a rappelés à Lui. » C’est le cardinal Angelo Comastri, archiprêtre de la basilique Saint-Pierre, qui prononcera la formule pour la proclamation de l’indulgence.
Ce décret précise que l’indulgence plénière est accordée aux malades, au personnel de santé, aux familles des malades et à tous ceux qui, y compris par la prière, s’occupent de ces derniers. Pour bénéficier de cette indulgence ils sont normalement invités à s’unir spirituellement par le biais des médias à la célébration de la messe, la récitation du chapelet, le Chemin de Croix ou à d’autres formes de dévotion. Si cela n’est pas possible, l’Église invite « au moins » à la récitation du Credo, du Notre Père et d’une invocation à Marie en offrant cette épreuve avec la volonté de remplir les conditions habituelles le plus tôt possible.
Quelle est la différence
entre le pardon des péchés et le don des indulgences ?
La confusion est courante entre le pardon des péchés et le don des indulgences. Une fois les péchés remis entièrement par la confession il reste en effet à nous remettre de leurs conséquences, pour guérir ce que le péché a blessé en nous.
En ce temps difficile de pandémie, l’Église a décidé d’accorder une indulgence plénière spéciale aux malades, à ceux qui les assistent, à leur famille, et à ceux qui prient pour eux. Une dépêche de l’AFP, reprise par de nombreux médias français, en a conclu que « l’Église pardonnait tous les péchés des croyants touchés par le coronavirus ». On peut lui reconnaître au moins le mérite d’avoir relayé l’information ; et s’il est dommage de propager en même temps une erreur, cela donne l’occasion de la rectifier.
L’indulgence n’est pas le pardon du péché
Il faut le dire tout net : les indulgences ne consistent pas à pardonner les péchés, puisqu’elles supposent au contraire ce pardon déjà reçu. Une fois nos péchés remis par le sacrement de pénitence, les indulgences visent à nous remettre de leurs conséquences, pour guérir peu à peu tout ce que le péché a blessé en nous. Pour faire comprendre la différence, Mgr Perrier, alors évêque de Lourdes, avait utilisé cette belle image lors du jubilé de l’an 2000 :
« Quand un incendie est éteint ou qu’une inondation est arrêtée, les dégâts restent. Il ne suffit pas d’être guéri pour retrouver la santé : sauf miracle, il faudra une longue convalescence. Dans l’ordre des relations, la fin d’une querelle ou un traité de paix n’efface pas d’emblée les blessures laissées par le temps du mépris. L’indulgence a pour effet de guérir ces blessures, par le secours de tous nos frères, les saints, et d’abord de Celui qui est le Saint de Dieu, Jésus-Christ. »
Si le sacrement de la pénitence éteint l’incendie, évitant ainsi le feu de l’enfer à qui mourrait en état de péché mortel, reste encore à réparer les dégâts : c’est l’œuvre des indulgences, qui purifient sur terre ce qui autrement devrait l’être au purgatoire avant de rejoindre le paradis. C’est donc d’une grande importance pour le chrétien qui croit en ces fins dernières. Mais pas seulement. Cela s’appuie aussi sur la foi en la communion des saints, car il est possible de gagner des indulgences pour autrui, vivants ou morts. L’Église elle-même peut décider de les appliquer largement en puisant dans le trésor des satisfactions du Christ et des saints.
Quand on y songe, c’est une très belle doctrine. Malheureusement, elle est trop ignorée, étant souvent mal comprise et parfois mal enseignée. Le Catéchisme de l’Église catholique, à propos des indulgences (n. 1471-1479), parle de purification des « peines temporelles » du péché. Qu’est-ce à dire ? Le cardinal Journet enseignait que si l’on ne veut pas se perdre face au mystère ténébreux du mal, il faut le considérer à partir du mystère lumineux de l’amour.ne croissance dans l’amour
Dieu est amour. Nul ne peut être ami de Dieu s’il n’est dans l’amour. Or le péché s’oppose à l’amour de Dieu. Pour être réconcilié avec Dieu, il faut être pleinement rétabli dans l’amour. C’est la grâce propre du sacrement de pénitence et de réconciliation de nous remettre en état de grâce, nous qui étions morts à la vie de grâce par le péché. Là, il n’y a pas d’intermédiaire : ou bien on est mort dans l’état de péché ; ou bien on est vivant dans l’état de grâce. En revanche, pour ce qui est de la vie de l’amour, il y a plusieurs degrés possibles. Car on peut croître en amour, et de deux manières. Le péché implique en effet un double mouvement : détournement de Dieu (aversio a Deo), attachement désordonné aux créatures (conversio ad creaturam). De même, la conversion implique ce double mouvement mais en sens inverse : attachement à Dieu (conversio ad Deum), détachement des créatures (aversio a creatura).

Pourquoi la bénédiction Urbi et Orbi du Pape aujourd’hui
est vraiment exceptionnelle ?
Le pape François doit donner une bénédiction Urbi et Orbi, « à la ville et au monde », ce vendredi 27 mars à partir de 18h. Il s’agit d’une bénédiction donnée en de rares occasion et c’est la seule que chacun peut recevoir sans y assister physiquement à travers les moyens de communication.
Aux grands maux les grands remèdes… spirituels. Face à l’épidémie de covid-19, le pape François multiplie les rendez-vous de prière avec les fidèles du monde entier. Ce vendredi 27 mars à partir de 18h, il invite chacun à s’unir à lui « par les moyens de communication », pour un moment de prière depuis la basilique Saint-Pierre de Rome. « Nous écouterons la Parole de Dieu, nous élèverons notre supplication, adorerons le Saint-Sacrement avec lequel, au terme de la cérémonie, je donnerai la bénédiction Urbi et Orbi, à laquelle sera jointe la possibilité de recevoir l’indulgence plénière », a-t-il indiqué.
Les effets très concrets de la bénédiction
Il s’agit là d’un geste spirituel extrêmement fort car c’est le seul acte que peut faire le Pape pour se rapprocher de tous les croyants à travers le monde. Bien sûr, il y a la messe que chacun peut suivre en direct. Mais « suivre » la célébration de la messe à travers les médias ne signifie pas, théologiquement, « participer ». Il n’y a pas de sacrements médiatiques. La messe télévisée ne remplace pas le sacrement de l’Eucharistie. Si l’on ne peut pas assister à la messe, la messe à la télévision peut être d’une grande aide, mais ce n’est pas un sacrement. L’acte que peut poser le Pape pour être concrètement présent dans la vie de chaque fidèle n’est autre que la bénédiction Urbi et Orbi. En d’autres termes, derrière leur écran ou en l’entendant à la radio, les fidèles reçoivent réellement cette bénédiction sur eux.
Cette dernière est une bénédiction apostolique spéciale donnée par le Pape, les trois doigts levés – symbole de la Sainte Trinité – depuis le balcon de la basilique Saint-Pierre. Il la fait chaque année le dimanche de Pâques, à Noël et à d’autres occasions spéciales comme l’élection d’un nouveau pape. Elle est habituellement précédée d’un message pour la paix dans le monde et assortie d’une indulgence plénière pour les catholiques.
Signifiant littéralement « pour la ville de Rome et pour le monde « , elle symbolise le fait que le Pape s’exprime à la fois en tant qu’évêque de Rome s’adressant aux fidèles réunis sur la place Saint-Pierre, mais aussi en tant que pasteur universel s’adressant aux catholiques du monde qui l’écoutent par le biais de la télévision ou de la radio.
Une bénédiction qui remonte au XIIIe siècle
Il s’agit de la seule bénédiction qui descende sur tous les fidèles qui y assistent de visu ou qui la suivent via la radio, la télévision ou les nouveaux médias. « Le pape François garantit une indulgence plénière à tous les croyants présents, à ceux qui reçoivent sa bénédiction par la radio, la télévision et les nouveaux médias », comme Aleteia, avait ainsi rappelé le cardinal camerlingue en 2013.
La bénédiction papale Urbi et Orbi remonterait au XIIIe siècle et aurait été développée par le pape Grégoire X. Au fil des siècles, elle a déjà été donnée depuis la basilique Saint Jean de Latran ou celle de Sainte Marie Majeure.

Urbi et Orbi: « Le temps du choix » (texte complet)
« Réorienter la route de la vie vers toi, Seigneur, et vers les autres »
« Seigneur, bénis le monde, donne la santé aux corps et le réconfort aux cœurs »: c’est la prière du pape François au terme d’un « temps de prière extraordinaire en période de pandémie », sur le parvis de la basilique Saint-Pierre, ce 27 mars 2020, à 18h, en direct en streaming et en Eurovision.
Le pape a discerné l’importance de ce moment, qui est le « temps du choix » pour chacun et pour l’humanité. Il s’agit de « réorienter la route de la vie vers toi, Seigneur, et vers les autres », a dit le pape.
Le pape François l’avait lui-même annoncé à l’angélus de dimanche dernier, 22 mars. La célébration a duré environ une heure, à la nuit tombée et sous la pluie. Le pape se trouvait debout sous l’auvent de la Place Saint-Pierre déserte, assis à sa gauche, le maître des célébrations liturgiques pontificales, Mgr Guido Marini.
Au bout de la Via della Conciliazione, Place Pie XII, quelques personnes étaient venues participer à ce « moment de prière extraordinaire en temps de pandémie » et recevoir la bénédiction Urbi et Orbi exceptionnelle.
Le pape François s’est incliné devant l »icône de la Vierge Marie et devant le grand crucifix, et, après la lecture de l’Evangile, il a commenté l’Evangile de la tempête apaisée dans saint Marc (Marc 4, 35-40).
Le pape a indiqué la situation de l’humanité à la croisée des chemin: « Un temps de choix. (…) C’est le temps de réorienter la route de la vie vers toi, Seigneur, et vers les autres. »
Il a rendu hommage – comme lors de la messe matinale – à ceux qui se dévouent pour les autres en ce moment, avec cette évidence que personne ne se sauvera seul: « Et nous pouvons voir de nombreux compagnons de voyage exemplaires qui, dans cette peur, ont réagi en donnant leur vie. C’est la force agissante de l’Esprit déversée et transformée en courageux et généreux dévouements. C’est la vie de l’Esprit capable de racheter, de valoriser et de montrer comment nos vies sont tissées et soutenues par des personnes ordinaires, souvent oubliées, qui ne font pas la une des journaux et des revues ni n’apparaissent dans les grands défilés du dernier show mais qui, sans aucun doute, sont en train d’écrire aujourd’hui les évènements décisifs de notre histoire : médecins, infirmiers et infirmières, employés de supermarchés, agents d’entretien, fournisseurs de soin à domicile, transporteurs, forces de l’ordre, volontaires, prêtres, religieuses et tant et tant d’autres qui ont compris que personne ne se sauve tout seul. »
« La prière et le service discret : ce sont nos armes gagnantes! », a insisté le pape.
Le pape a actualisé l’épisode évangélique en disant: « Nous avons été pris au dépourvu par une tempête inattendue et furieuse. Nous nous nous rendons compte que nous nous trouvons dans la même barque, tous fragiles et désorientés, mais en même temps tous importants et nécessaires, tous appelés à ramer ensemble, tous ayant besoin de nous réconforter mutuellement. »
Il a constaté cet effet de la crise du coronavirus sur le monde: « La tempête démasque notre vulnérabilité et révèle ces sécurités, fausses et superflues, avec lesquelles nous avons construit nos agendas, nos projets, nos habitudes et priorités. »
Il se dessine au contraire une fraternité nouvelle, a fait remarquer le pape: « Reste manifeste, encore une fois, cette appartenance commune (bénie), à laquelle nous ne pouvons pas nous soustraire : le fait d’être frères. »
Le pape a comme confessé les erreurs et le rythme effréné du monde jusqu’au coup d’arrêt du confinement: « Nous sommes allés de l’avant à toute vitesse, en nous sentant forts et capables dans tous les domaines. Avides de gains, nous nous sommes laissé absorber par les choses et étourdir par la hâte. Nous ne nous sommes pas arrêtés face à tes rappels, nous ne nous sommes pas réveillés face à des guerres et à des injustices planétaires, nous n’avons pas écouté le cri des pauvres et de notre planète gravement malade. Nous avons continué notre route, imperturbables, en pensant rester toujours sains dans un monde malade. »
Mais en même temps, le pape a indiqué un remède: « Seigneur, tu nous adresses un appel, un appel à la foi qui ne consiste pas tant à croire que tu existes, mais à aller vers toi et à se fier à toi. »
À la fin de la célébration, le pape a accordé la bénédiction « Urbi et Orbi », à laquelle est attachée la possibilité de recevoir l’indulgence plénière.
Cette célébration a eu lieu en présence d’une icône de Marie « Salut du Peuple Romain » – vénérée à Sainte-Marie-Majeure -, devant laquelle le pape est allé prier dimanche 15 mars, pour invoquer l’intercession de Marie pour la fin de la pandémie.
Le pape s’est aussi rendu, ce même dimanche 15 mars, Via del Corso à l’église San Marcellino pour prier devant le grand crucifix porté en procession dans les rues de Rome en 1522 pour demander la fin de la grande peste: depuis, le crucifix est réputé miraculeux. Il a été spécialement et exceptionnellement transporté de San Marcellino au Vatican pour ce temps de prière mondial.
Le Saint-Sacrement a été exposé sur un autel situé dans l’atrium de la basilique vaticane, et, après la méditation du pape, il y a eu une prière de supplication sous forme de litanie: « nous t’adorons, … nous croyons, … libère-nous, Seigneur, … sauve-nous, Seigneur, … console-nous, Seigneur, … donne-nous l’espérance ».
D’habitude la bénédiction Urbi et Orbi, sur la ville de Rome et sur le monde, est réservée à Noël et à Pâques, et lors de l’élection d’un nouveau pape. Elle suppose notamment, pour recevoir l’indulgence plénière, la communion eucharistique et la confession, qui, actuellement, ne sont possibles, pour la plupart, que de façon « spirituelle ».
Tandis que la pluie tombait, sur le brasero, l’encens montait avec la prière.
Voici la méditation du pape François, prononcée en italien.
Temps de prière extraordinaire, capture @ Vatican Media
Méditation du pape François
«Le soir venu» (Mc 4, 35). Ainsi commence l’Evangile que nous avons écouté. Depuis des semaines, la nuit semble tomber. D’épaisses ténèbres couvrent nos places, nos routes et nos villes; elles se sont emparées de nos vies en remplissant tout d’un silence assourdissant et d’un vide désolant, qui paralyse tout sur son passage: cela se sent dans l’air, cela se ressent dans les gestes, les regards le disent. Nous nous retrouvons apeurés et perdus. Comme les disciples de l’Evangile, nous avons été pris au dépourvu par une tempête inattendue et furieuse. Nous rendons compte que nous nous trouvons dans la même barque, tous fragiles et désorientés, mais en même temps tous importants et nécessaires, tous appelés à ramer ensemble, tous ayant besoin de nous réconforter mutuellement. Dans cette barque… nous trouvons tous. Comme ces disciples qui parlent d’une seule voix et dans l’angoisse disent: «Nous sommes perdus» (v. 38), nous aussi, nous nous apercevons que nous ne pouvons pas aller de l’avant chacun tout seul, mais seulement ensemble.
Il est facile de nous retrouver dans ce récit. Ce qui est difficile, c’est de comprendre le comportement de Jésus. Alors que les disciples sont naturellement inquiets et désespérés, il est à l’arrière, à l’endroit de la barque qui coulera en premier. Et que fait-il? Malgré tout le bruit, il dort serein, confiant dans le Père – c’est la seule fois où, dans l’Evangile, nous voyons Jésus dormir –. Puis, quand il est réveillé, après avoir calmé le vent et les eaux, il s’adresse aux disciples sur un ton de reproche: «Pourquoi êtes-vous si craintifs? N’avez-vous pas encore la foi?» (v. 40).
Cherchons à comprendre. En quoi consiste le manque de foi de la part des disciples, qui s’oppose à la confiance de Jésus? Ils n’avaient pas cessé de croire en lui. En effet, ils l’invoquent. Mais voyons comment ils l’invoquent: «Maître, nous sommes perdus; cela ne te fait rien?» (v. 38). Cela ne te fait rien: ils pensent que Jésus se désintéresse d’eux, qu’il ne se soucie pas d’eux. Entre nous, dans nos familles, l’une des choses qui fait le plus mal, c’est quand nous nous entendons dire: “Tu ne te soucies pas de moi?”. C’est une phrase qui blesse et déclenche des tempêtes dans le cœur. Cela aura aussi touché Jésus, car lui, plus que personne, tient à nous. En effet, une fois invoqué, il sauve ses disciples découragés.
La tempête démasque notre vulnérabilité et révèle ces sécurités, fausses et superflues, avec lesquelles nous avons construit nos agendas, nos projets, nos habitudes et priorités. Elle nous démontre comment nous avons laissé endormi et abandonné ce qui alimente, soutient et donne force à notre vie ainsi qu’à notre communauté. La tempête révèle toutes les intentions d’“emballer” et d’oublier ce qui a nourri l’âme de nos peuples, toutes ces tentatives d’anesthésier avec des habitudes apparemment “salvatrices”, incapables de faire appel à nos racines et d’évoquer la mémoire de nos anciens, en nous privant ainsi de l’immunité nécessaire pour affronter l’adversité.
À la faveur de la tempête, est tombé le maquillage des stéréotypes avec lequel nous cachions nos “ego” toujours préoccupés de leur image ; et reste manifeste, encore une fois, cette appartenance commune (bénie), à laquelle nous ne pouvons pas nous soustraire: le fait d’être frères.
«Pourquoi êtes-vous si craintifs? N’avez-vous pas encore la foi?». Seigneur, ce soir, ta Parole nous touche et nous concerne tous. Dans notre monde, que tu aimes plus que nous, nous sommes allés de l’avant à toute vitesse, en nous sentant forts et capables dans tous les domaines. Avides de gains, nous nous sommes laissé absorber par les choses et étourdir par la hâte. Nous ne nous sommes pas arrêtés face à tes rappels, nous ne nous sommes pas réveillés face à des guerres et à des injustices planétaires, nous n’avons pas écouté le cri des pauvres et de notre planète gravement malade. Nous avons continué notre route, imperturbables, en pensant rester toujours sains dans un monde malade. Maintenant, alors que nous sommes dans une mer agitée, nous t’implorons: “Réveille-toi Seigneur!”.
«Pourquoi êtes-vous si craintifs? N’avez-vous pas encore la foi?». Seigneur, tu nous adresses un appel, un appel à la foi qui ne consiste pas tant à croire que tu existes, mais à aller vers toi et à se fier à toi. Durant ce Carême, ton appel urgent résonne : “Convertissez-vous”, «Revenez à moi de tout votre cœur» (Jl 2, 12). Tu nous invites à saisir ce temps d’épreuve comme un temps de choix. Ce n’est pas le temps de ton jugement, mais celui de notre jugement: le temps de choisir ce qui importe et ce qui passe, de séparer ce qui est nécessaire de ce qui ne l’est pas. C’est le temps de réorienter la route de la vie vers toi, Seigneur, et vers les autres. Et nous pouvons voir de nombreux compagnons de voyage exemplaires qui, dans cette peur, ont réagi en donnant leur vie. C’est la force agissante de l’Esprit déversée et transformée en courageux et généreux dévouements. C’est la vie de l’Esprit capable de racheter, de valoriser et de montrer comment nos vies sont tissées et soutenues par des personnes ordinaires, souvent oubliées, qui ne font pas la une des journaux et des revues ni n’apparaissent dans les grands défilés du dernier show mais qui, sans aucun doute, sont en train d’écrire aujourd’hui les évènements décisifs de notre histoire: médecins, infirmiers et infirmières, employés de supermarchés, agents d’entretien, fournisseurs de soin à domicile, transporteurs, forces de l’ordre, volontaires, prêtres, religieuses et tant et tant d’autres qui ont compris que personne ne se sauve tout seul. Face à la souffrance, où se mesure le vrai développement de nos peuples, nous découvrons et nous expérimentons la prière sacerdotale de Jésus: «Que tous soient un » (Jn 17, 21). Que de personnes font preuve chaque jour de patience et insufflent l’espérance, en veillant à ne pas créer la panique mais la co-responsabilité! Que de pères, de mères, de grands-pères et de grands-mères, que d’enseignants montrent à nos enfants, par des gestes simples et quotidiens, comment affronter et traverser une crise en réadaptant les habitudes, en levant les regards et en stimulant la prière! Que de personnes prient, offrent et intercèdent pour le bien de tous. La prière et le service discret: ce sont nos armes gagnantes !
«Pourquoi avez-vous peur? N’avez-vous pas encore la foi? ». Le début de la foi, c’est de savoir qu’on a besoin de salut. Nous ne sommes pas autosuffisants; seuls, nous faisons naufrage: nous avons besoin du Seigneur, comme les anciens navigateurs, des étoiles. Invitons Jésus dans les barques de nos vies. Confions-lui nos peurs, pour qu’il puisse les vaincre. Comme les disciples, nous ferons l’expérience qu’avec lui à bord, on ne fait pas naufrage. Car voici la force de Dieu: orienter vers le bien tout ce qui nous arrive, même les choses tristes. Il apporte la sérénité dans nos tempêtes, car avec Dieu la vie ne meurt jamais.
Le Seigneur nous interpelle et, au milieu de notre tempête, il nous invite à réveiller puis à activer la solidarité et l’espérance capables de donner stabilité, soutien et sens en ces heures où tout semble faire naufrage. Le Seigneur se réveille pour réveiller et raviver notre foi pascale. Nous avons une ancre: par sa croix, nous avons été sauvés. Nous avons un gouvernail: par sa croix, nous avons été rachetés. Nous avons une espérance: par sa croix, nous avons été rénovés et embrassés afin que rien ni personne ne nous sépare de son amour rédempteur. Dans l’isolement où nous souffrons du manque d’affections et de rencontres, en faisant l’expérience du manque de beaucoup de choses, écoutons une fois encore l’annonce qui nous sauve: il est ressuscité et vit à nos côtés. Le Seigneur nous exhorte de sa croix à retrouver la vie qui nous attend, à regarder vers ceux qui nous sollicitent, à renforcer, reconnaître et stimuler la grâce qui nous habite. N’éteignons pas la flamme qui faiblit (cf. Is 42, 3) qui ne s’altère jamais, et laissons-la rallumer l’espérance.
Embrasser la croix, c’est trouver le courage d’embrasser toutes les contrariétés du temps présent, en abandonnant un moment notre soif de toute puissance et de possession, pour faire place à la créativité que seul l’Esprit est capable de susciter. C’est trouver le courage d’ouvrir des espaces où tous peuvent se sentir appelés, et permettre de nouvelles formes d’hospitalité et de fraternité ainsi que de solidarité. Par sa croix, nous avons été sauvés pour accueillir l’espérance et permettre que ce soit elle qui renforce et soutienne toutes les mesures et toutes les pistes possibles qui puissent aider à nous préserver et à sauvegarder. Étreindre le Seigneur pour embrasser l’espérance, voilà la force de la foi, qui libère de la peur et donne de l’espérance.
«Pourquoi êtes-vous si craintifs? N’avez-vous pas encore la foi? » Chers frères et sœurs, de ce lieu, qui raconte la foi, solide comme le roc, de Pierre, je voudrais ce soir vous confier tous au Seigneur, par l’intercession de la Vierge, salut de son peuple, étoile de la mer dans la tempête. Que, de cette colonnade qui embrasse Rome et le monde, descende sur vous, comme une étreinte consolante, la bénédiction de Dieu.
Seigneur, bénis le monde, donne la santé aux corps et le réconfort aux cœurs.
Tu nous demandes de ne pas avoir peur.
Mais notre foi est faible et nous sommes craintifs.
Mais toi, Seigneur, ne nous laisse pas à la merci de la tempête.
Redis encore : « N’ayez pas peur » (Mt 28, 5).
Et nous, avec Pierre, “nous nous déchargeons sur toi de tous nos soucis, car tu prends soin de nous” (cf. 1P 5, 7).

Adoro te devote, latens Deitas,
quae sub his figuris vere latitas :
tibi se cor meum totum subjicit,
quia Te contemplans totum deficit.
Visus, tactus, gustus in Te fallitur,
sed auditu solo tuto creditur :
credo quidquid dixit Dei Filius :
nil hoc Verbo veritatis verius.
In cruce latebat sola Deitas,
at hic latet simul et humanitas :
ambo tamen credens atque confitens,
peto quod petivit latro poenitens.
Plagas, sicut Thomas, non intueor :
Deum tamen meum te confiteor :
fac me tibi semper magis credere,
in te spem habere, te diligere.
O memoriale mortis Domini,
panis vivus, vitam praestans homini,
praesta meae menti de te vivere,
et te illi semper dulce sápere.
Pie pelicane, Jesu Domine,
me immundum munda tuo sanguine,
cujus una stilla salvum facere
totum mundum quit ab omni scelere.
Jesu, quem velatum nunc aspicio :
oro fiat illud, quod tam sitio :
ut te revelata cernens facie,
visu sim beatus tuae gloriae.
Amen.

Je t’adore dévotement, Dieu caché
Qui sous ces apparences vraiment prends corps,
À Toi, mon cœur tout entier se soumet
Parce qu’à te contempler, tout entier il s’abandonne.
La vue, le goût, le toucher, en toi font ici défaut,
Mais t’écouter seulement fonde la certitude de foi.
Je crois tout ce qu’a dit le Fils de Dieu,
Il n’est rien de plus vrai que cette Parole de vérité.
Sur la croix, se cachait ta seule divinité,
Mais ici, en même temps, se cache aussi ton humanité.
Toutes les deux, cependant, je les crois et les confesse,
Je demande ce qu’a demandé le larron pénitent.
Tes plaies, tel Thomas, moi je ne les vois pas,
Mon Dieu, cependant, tu l’es, je le confesse,
Fais que, toujours davantage, en toi je croie,
Je place mon espérance, je t’aime.
O mémorial de la mort du Seigneur,
Pain vivant qui procure la vie à l’homme,
Procure à mon esprit de vivre de toi
Et de toujours savourer ta douceur.
Pieux pélican, Jésus mon Seigneur,
Moi qui suis impur, purifie-moi par ton sang
Dont une seule goutte aurait suffi à sauver
Le monde entier de toute faute.
Jésus, que sous un voile, à présent, je regarde,
Je t’en prie, que se réalise ce dont j’ai tant soif,
Te contempler, la face dévoilée,
Que je sois bienheureux, à la vue de ta gloire.
Amen

Adoration et bénédiction Urbi et Orbi avec le Saint-Sacrement
Le Saint-Père s'est ensuite rendu devant l'image de la Salus Populi Romani et le crucifix de Saint Marcel, dont l’exposition avait mis fin, en 1522, à la grande peste de Rome. François est ensuite entré dans l'atrium par la porte centrale de la basilique. L'adoration du Saint-Sacrement exposé sur l'autel, enveloppé d'encens, était rythmée par une prière de supplication pour demander au Seigneur de sauver l'humanité, et dont voici une traduction en français:
«Vrai Dieu et vrai homme, réellement présent en ce Saint-Sacrement, nous t’adorons, Seigneur.
Notre Sauveur, Dieu avec nous, fidèle et riche de miséricorde, nous t’adorons Seigneur.
Roi et Seigneur de la Création et de l’Histoire, nous t’adorons, Seigneur.
Vainqueur du péché et de la mort, nous t’adorons, Seigneur.
Ami de l’homme, ressuscité et vivant à la droite du Père, nous t’adorons, Seigneur.
Fils unique du Père, descendu du Ciel pour notre Salut, nous croyons en Toi, Seigneur.
Médecin céleste, qui t’inclines sur notre misère, nous croyons en Toi, Seigneur.
Agneau immolé, qui t’offres pour nous racheter du mal, nous croyons en Toi, Seigneur.
Bon Pasteur, qui donnes la vie pour ton troupeau, nous croyons en Toi, Seigneur.
Pain vivant et médecin d’immortalité qui nous donnes la vie éternelle, nous croyons en Toi, Seigneur.
Du pouvoir de Satan et des séductions du monde, libère-nous, Seigneur.
De l’orgueil et de la quête de pouvoir, libère-nous, Seigneur.
Des engrenages de la peur et de l’angoisse, libère-nous, Seigneur.
De l’incrédulité et du désespoir, libère-nous, Seigneur.
De la dureté de cœur et de l’incapacité à aimer, libère-nous Seigneur.
De tous les maux qui affligent l’humanité, sauve-nous, Seigneur.
De la faim, de la famine et de l’égoïsme, sauve-nous, Seigneur.
Des maladies, des épidémies et de la peur du frère, sauve-nous, Seigneur.
De la folie dévastatrice, des intérêts sans pitié et de la violence, sauve-nous, Seigneur.
Des tromperies, de la mauvaise information et des manipulations de la conscience, sauve-nous Seigneur.
Regarde ton Église qui traverse le désert. Console-nous, Seigneur.
Regarde l’humanité, frappée par la peur et par l’angoisse. Console-nous, Seigneur.
Regarde les malades et les moribonds, opprimés par la solitude. Console-nous, Seigneur.
Regarde les médecins et les opérateurs de santé, épuisés par la fatigue. Console-nous, Seigneur.
Regarde les responsables politiques et les administrateurs, qui portent le poids des choix. Console-nous, Seigneur.
À l’heure de l’épreuve et de la perte, donne-nous ton Esprit, Seigneur.
Dans la tentation et dans la fragilité, donne-nous ton Esprit, Seigneur.
Dans le combat contre le mal et le péché, donne-nous ton Esprit, Seigneur.
Dans la recherche du vrai bien et de la vraie joie, donne-nous ton Esprit, Seigneur.
Dans la décision de demeurer en Toi et dans ton amitié, donne-nous ton Esprit, Seigneur.
Si le péché nous opprime, ouvre-nous à l’espérance, Seigneur.
Si la haine nous ferme le cœur, ouvre-nous à l’espérance, Seigneur.
Si la douleur nous visite, ouvre-nous à l’espérance, Seigneur.
Si l’indifférence nous angoisse, ouvre-nous à l’espérance, Seigneur.
Si la mort nous anéantit, ouvre-nous à l’espérance, Seigneur.»
Après la supplication, le rite de la bénédiction eucharistique Urbi et Orbi a suivi, adressé à la ville de Rome et au monde entier. Le cardinal Angelo Comastri, archiprêtre de la basilique Saint-Pierre, a prononcé la formule pour la proclamation de l'indulgence. Tous ceux qui ont reçu la bénédiction eucharistique par la radio, la télévision et d'autres technologies de communication, mais aussi tous ceux qui se sont unis à cet évènement simplement dans la prière même sans accès aux médias, ont obtenu l'indulgence plénière dans la forme établie par l'Église.
